Archives mensuelles : mars 2010

Singer approuve une fois de plus l’exploitation animale / Drayson à propos de la vivisection au Royaume-Uni

Chers Collègues:

Deux informations sont tombées sur mon bureau ces jours-ci.

La première, c’est ce que Peter Singer, le « père du mouvement des droits des animaux », a déclaré lors d’une interview :

PROFESSEUR PETER SINGER : Si nous sommes sur le point de consommer des produits d’origine animale, alors je pense que nous avons la lourde responsabilité de nous assurer que les animaux n’ont pas souffert. Et cela implique au minimum d’aller sur les marchés locaux, ou à tout le moins d’acheter des produits écologiquement certifiés, eu égard au système actuel.

Ce sera définitivement mieux que de recourir à la production des fermes industrielles. Il s’agit là de choix. De toute façon, je ne pense pas que nous devrions consommer autant de viande et de produits animaux que nous le faisons.

Ainsi, en consommant de la viande et des produits animaux fabriqués localement, ou encore « écologiquement certifiés », nous nous déchargerions de la « lourde responsabilité… de nous assurer que les animaux n’ont pas souffert. » C’est absurde. La viande et les produits animaux, qu’ils soient écologiques ou fabriqués localement, proviennent d’animaux qui ont été torturés. Le commentaire de Singer ne diffère en rien de celui-ci :

Si nous sommes sur le point de molester des enfants, alors je pense que nous avons la lourde responsabilité de nous assurer qu’ils n’ont pas souffert. Et cela implique de leur donner un morceau de chocolat.

Et Singer d’ajouter que nous ne devrions pas consommer « autant de viande et de produits animaux que nous le faisons. »

Peter, la quantité de viande et de produits animaux que nous devrions consommer est de zéro.

Grâce soit rendue à Notre Père d’avoir une fois de plus renforcé l’idée que l’exploitation animale serait moralement acceptable.

La seconde, c’est que le Ministre des Sciences britannique, Lord Drayson, a noté qu’en dépit des actions directes de militants visant des vivisecteurs, le nombre d’expérimentations animales au Royaume-Uni a augmenté de 14% par rapport à l’année dernière, et qu’une étude

montre que seulement un tiers des adultes britanniques sont favorables à une interdiction de l’expérimentation animale, cependant que le nombre de gens qui l’acceptent désormais de manière inconditionnelle eu égard aux besoins de la recherche a augmenté de 28% depuis 1999.

Manifestement, l’approche actuelle ne fonctionne pas. Au-delà de la question de la moralité de la violence, l’action directe militante ne fait rien d’autre qu’intensifier le préjugé selon lequel les droits des animaux ne sont qu’une question marginale promue par des fous qui ne devraient pas être pris au sérieux. Mais cela ne doit pas nous surprendre. Dans un monde où une majorité écrasante de gens pense qu’il est moralement acceptable d’infliger douleur, souffrance et mort à 56 milliards d’animaux par an sans d’autre raison que celle de leur bon goût, le public n’est pas prêt à considérer ceux qui embrassent la violence pour lutter contre l’exploitation d’animaux qui leur sont vendus comme nécessaires à leur santé comme autre chose que des fous. Cet état de choses fait échouer toute discussion sérieuse à propos de la moralité de l’exploitation animale.

Il nous faut déplacer le paradigme du statut de propriété vers celui de personne morale. Et la seule manière d’y parvenir passe par une éducation au véganisme créative et non-violente.

Gary L. Francione
©2010 Gary L. Francione

Commentaire n°16 : réponse à vos questions sur les campagnes ciblées et sur l’opposition à l’approche abolitionniste

Chers Collègues :

Il y a plusieurs semaines, j’ai lancé un appel en direction des personnes qui voudraient m’adresser des questions. J’en ai reçu approximativement 80. Je prévois de rédiger plusieurs Commentaires dans lesquels je débattrai de certaines d’entre elles.

Plusieurs des questions que j’ai reçues concernent les campagnes ciblées. Par conséquent, ce Commentaire traite essentiellement de ce sujet ainsi que de savoir pourquoi la plupart de ceux qui promeuvent la violence sont hostiles à l’approche abolitionniste.

Gary L. Francione
©2010 Gary L. Francione

Euphorie ? Pour qui ?

Chers Collègues :

Dans mon précédent billet, Partenaires dans l’exploitation, j’ai débattu des différents programmes de labelling approuvés et promus par HSUS, PETA et d’autres sociétés commerciales spécialisées dans le bien-être animal.

Ô surprise, hier, je suis allé au Whole Foods Market local, vous savez, la chaîne de magasins à laquelle PETA a décerné le prix du Best Animal-Friendly Retailer, et j’ai pris un exemplaire de « Whole Deal », le magazine de Whole Foods.

A l’intérieur, il y avait un coupon pour des « Parfaits Brown Cow au naturel », qui combinent apparemment différents parfums de yaourts.

Yaourt ? Mais les yaourts n’impliquent-ils pas la souffrance et la mort des animaux ?

Ne vous en faites pas !
Comme vous pouvez voir :

Euphorie?

Ce yaourt porte l’étiquette « Certifié Elevé et Manipulé avec Humanité ». Le label « Certifié Elevé et Manipulé avec Humanité » est un cachet d’approbation émanant d’une organisation appelée Humane Farm Animal Care, qui l’a développé avec ses partenaires, parmi lesquels figure la Humane Society of the United States (HSUS). Le label HFAC/HSUS est défini comme « un certificat-consommateur et un programme-labelling » destiné à donner aux consommateurs l’assurance que « les œufs, les produits laitiers, la viande ou la volaille [ainsi labellisés] ont été produits avec dans l’esprit le bien-être des animaux d’élevage ».

La subtile légende du coupon nous apprend que le Parfait Brown Cow :

« Répond aux principes du Programme Humane Farm Animal Care. Les animaux bénéficient d’un régime alimentaire nutritif, sans antibiotiques ni hormones. Ils disposent d’abris et d’aires de repos, d’un espace suffisant et de la possibilité de satisfaire leurs comportements naturels. »

Vous remarquerez en outre que la vache qui figure sur le coupon porte un petit képi et tient dans sa bouche une cuillère. Ainsi tout va bien ! Vous voyez, elle vous sert de plein gré ce produit fait avec sa souffrance et sa mort, ainsi qu’avec la souffrance et la mort de ses enfants.

Le mot « Euphorie ! » figure en tête du coupon. L’ « euphorie » est définie comme une « sensation de bonheur ou de bien-être ».

Mais de l’euphorie de qui, de la sensation de bonheur et de bien-être de qui parle-t-on ici ?

Peut-être parle-t-on de l’euphorie de Humane Farm Animal Care, qui prélève des droits sur chacun de ses petits cachets d’approbation ? Peut-être parle-t-on de l’euphorie de HSUS, qui fait la promotion de ses produits « humains » afin que ses membres et le public en général se sentent généreux et aient bonne conscience de consommer les produits de la torture animale ? Peut-être parle-t-on de l’euphorie de Whole Foods, qui fait du trafic « humain » de chair animale et de produits d’animaux « heureux », et qui fait ainsi fortune ?
Peut-être parle-t-on de l’euphorie de PETA, qui décerne des prix aux endroits comme Whole Foods de sorte qu’à l’instar de HSUS, elle profite des bénéfices de la « viande heureuse » et encourage à la consommation des animaux ?

Il est en tout cas une chose dont nous pouvons être complètement sûrs : ce n’est pas l’euphorie de la vache.

Si vous n’êtes pas végan, devenez-le. C’est incroyablement facile. C’est bon pour la santé. C’est bon pour la planète, qui permet toute vie. Et par-dessus tout, c’est, moralement parlant, la bonne chose à faire.

Gary L. Francione
©2010 Gary L. Francione

Partenaires dans l’exploitation

Chers Collègues :

Le but explicite des campagnes et des organisations welfaristes consiste le plus souvent à rendre la société plus à l’aise vis-à-vis de l’exploitation animale et l’encourager à la consommation.

Par exemple, de nombreux et importants groupes de défense animale aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne travaillent à promouvoir des labels conférant à la chair et aux produits des nonhumains un certificat d’approbation. Humane Farm Animal Care (HFAC), aux côtés de HSUS, American Society for the Prevention of Cruelty to Animals, Animal People, World Society for the Protection of Animals et d’autres partenaires, fait par exemple la promotion du label « Certifié élevé et manipulé avec humanité », qu’elle définit comme « un certificat-consommateur et un programme-label » destiné à donner aux consommateurs l’assurance que « les œufs, les produits laitiers, la viande ou la volaille labellisés ont été conçus dans l’esprit du bien-être des animaux d’élevage. »

HFAC souligne que « le stress peut affecter la qualité de la viande des animaux destinés à la consommation… ainsi que [leur] état de santé général », et que le label « instaure une situation triplement gagnante pour les détaillants et les restaurateurs, les producteurs et les consommateurs. La victoire, pour les agriculteurs, réside dans le fait qu’ils peuvent acquérir une distinction, augmenter leurs profits et leurs parts de marché en optant pour des pratiques plus viables. » Les détaillants sont également gagnants puisque « les aliments naturels et écologiques représentent la catégorie épicière ayant réalisé le bond le plus rapide ces dernières années. Aujourd’hui les épiciers, les détaillants, les restaurants, les producteurs et les organisateurs de services alimentaires peuvent jouir d’opportunités en termes de ventes et de profits grâce au label ‘Certifié Elevé et Manipulé avec Humanité’ ».

La Humane Society International, une branche de HSUS, a lancé le label « Humane Choice » en Australie, dont elle assure qu’il « garantira au consommateur que l’animal a été traité avec attention et respect de sa naissance à sa mort ». Un produit portant l’étiquette « Humane Choice » assure le consommateur que :

Les animaux ont eu la meilleure vie et la meilleure mort qui puissent être offertes à un animal d’élevage. Fondamentalement, ils vivent comme ils auraient vécu dans une vieille ferme McDonald. Ils peuvent satisfaire leurs besoins comportementaux, fourrager, se mouvoir librement sans cage ni attache, bénéficier d’un libre accès aux espaces extérieurs, s’abriter à l’ombre quand il fait chaud, au chaud quand il fait froid, bénéficier d’un bon régime alimentaire et d’une mort infligée avec humanité.

Whole Foods Market, Inc., une chaîne de supermarchés implantée aux Etats-Unis, au Canada et en Grande-Bretagne, à qui PETA a décerné le prix Best Animal-Friendly Retailer, prétend travailler « avec des fournisseurs en viande et volailles passionnés et bien informés aussi bien qu’avec des experts d’avenir du traitement humain des animaux » afin d’ « améliorer non seulement la qualité et la sûreté de la viande que nous vendons, mais aussi [d’] assurer des conditions de vie humaines aux animaux. » Whole Foods affirme également que les « Animal Compassionate Standards, spécifiques à chaque espèce, qui posent comme obligatoires un environnement et des conditions de vie comblant les besoins physiques, émotionnels et sociaux des animaux, sont actuellement en cours de développement. Les producteurs qui adhèrent volontairement et avec succès à ces Standards pourront labelliser leurs produits avec la mention spéciale ‘Compassion pour les animaux’. » Peter Singer, PETA et d’autres organisations welfaristes ont approuvé avec enthousiasme les « Animal Compassionate Standards ».

En Grande-Bretagne, la RSPCA décerne quant à elle le label « Freedom Food », qui représente « l’assurance d’un élevage respectueux et d’une nourriture labellisée établie par la RSPCA, l’une des principales organisations de protection animale du monde. L’idée d’un tel projet émane de la fondation elle-même. Il a été mis en place en 1994 pour améliorer le bien-être des animaux d’élevage et offrir aux consommateurs un choix plus large de produits humains. » La RSPCA délivre des « certificats aux agriculteurs, transporteurs, abattoirs, fabricants et emballeurs, et approuve les élevages en plein air, écologiques et couverts. »

Le label Freedom Food « donne aux consommateurs l’assurance que le projet a été appuyé par la RSPCA, l’une des organisations de protection animale les plus respectées au monde. » La RSPCA invite les consommateurs à manifester leur soutien à l’amélioration du bien-être des animaux d’élevage et à l’établissement de meilleurs critères de bien-être « en optant pour des produits bénéficiant du logo Freedom Food ». Les producteurs peuvent augmenter la valeur de leurs produits animaux car le label Freedom Food « singularise vos produits et peut vous donner des avantages en termes de compétitivité. L’affichage du logo Freedom Food permet aux consommateurs d’identifier vos produits comme gages d’un meilleur bien-être des animaux. » Les producteurs en bénéficient également via l’augmentation des marges, le développement d’un « créneau » pour des produits « gages d’un meilleur bien-être » leur permettant d’ « élargir… [le] marché cible » et l’ « association avec la RSPCA, l’une des organisations de protection animale les plus réputées du monde. »

De plus, les producteurs peuvent « gagner en crédibilité dans la chaîne d’approvisionnement » et réaliser d’autres bénéfices économiques tels qu’une assurance agricole meilleur marché disponible via la RSPCA. Et la RSPCA en réalité aidera les producteurs à commercialiser leur chair animale et leurs autres produits animaux : « Nous utilisons toute une gamme d’instruments marketing tels que publicité, relations publiques, sites web, expositions, échantillons gratuits ou promotions. Nous collaborons aussi étroitement avec les détaillants nationaux afin de développer des activités promotionnelles communes, d’entreprendre des campagnes collectives avec la RSPCA et de garantir des offres marketing à nos membres. »

Pour moi, il est clair que ces grosses sociétés commerciales sont devenues des partenaires de l’industrie afin de favoriser la consommation de produits d’origine animale.

Cette question sera débattue dans un prochain livre, The Animal Rights Debate: Abolition or Regulation?, que j’ai coécrit avec le Professeur Robert Garner et qui paraîtra prochainement chez Columbia University Press.

Et rappelez-vous : Le monde est végane ! Si vous le voulez.

Gary L. Francione
©2010 Gary L. Francione

Huit animaux

Chers Collègues :

Ce matin figurait dans les News d’AOL l’article Les taux d’euthanasie chez PETA déclenchent des critiques rageuses.

Celui-ci révèle que PETA:

euthanasie plus de 90 % des chiens et des chats abandonnés dans son siège central à Norfolk, en Virginie. En 2009, PETA a euthanasié 2301 chiens et chats – soit 97 % des animaux recueillis – et procédé à l’adoption de seulement huit d’entre eux, selon les statistiques de l’Etat de Virginie. Et le taux de ces tueries est en augmentation. De 2004 à 2008, l’euthanasie chez PETA a progressé de 10 %.

J’ai vérifié les documents que PETA a déposés au Département de l’Agriculture et des Services à la Consommation de Virginie. Je confirme que l’article d’AOL est exact. PETA a tué 681 chiens et 1620 chats. PETA a également tué 51 « autres animaux de compagnie ».

Cela fait un total de 2352 animaux.

Et PETA a adopté huit animaux. Huit animaux.

C’est une honte. La mort par « euthanasie » est donnée dans l’intérêt des humains ou des nonhumains euthanasiés. L’euthanasie n’est jamais dans l’intérêt d’un être en bonne santé.

PETA partage apparemment l’opinion de Singer selon laquelle une mort relativement sans douleur ne constitue pas un mal pour les animaux nonhumains, pour la raison qu’à la différence des humains, la plupart d’entre eux n’auraient pas conscience d’eux-mêmes et ne pourraient comprendre ce que signifie « avoir une vie ». Selon ce point de vue, il faut être humain pour avoir un intérêt à poursuivre son existence. Aussi PETA n’a pas vraiment fait de mal aux 2352 animaux qu’elle a euthanasiés : de toute façon, ils se moquaient d’être en vie, et rien par conséquent ne leur a été pris quand ils ont été tués.

Quel total non-sens spéciste.

Selon l’Institut de Recherche Economique, les revenus de PETA s’élèvent à 31.053.316 $, et ses avoirs à 19.759.999 $.

Quelle part de cet argent va à un programme d’adoption ?

Combien parmi les célébrités enrôlées par PETA encouragent l’adoption des animaux recueillis par l’organisation au lieu d’enlever leurs vêtements et d’ « aller nues » pour la gloire, la publicité constante et la promotion de PETA ?

Huit animaux ? Il semblerait que le personnel du bureau aurait pu en faire adopter davantage.

Combinez cela avec le sexisme de PETA et vous obtiendrez des prix décernés à des concepteurs d’abattoirs ou des chaînes d’épicerie vendant de la viande et des produits d’origine animale « heureux ». Il est clair que PETA n’est rien d’autre qu’une immense blague, bien que, pour les animaux, c’en soit une des plus tragiques.

Gary L. Francione
©2010 Gary L. Francione

P.S. ajouté le 11 mars 2010 :

L’autre soir, j’ai fait un commentaire sur Twitter :

Temple Grandin annonce qu’elle va dessiner pour PETA des équipements « humains » pour l’abattage des milliers d’animaux « sauvés ».

C’était évidemment voulu, afin de pasticher le fait que PETA a décerné un prix à Grandin et qu’elle a qualifié celle-ci de « visionnaire » pour avoir créé des abattoirs dont elle fait l’éloge.

Un nombre considérable de personnes ont pensé que ce commentaire était sérieux. Je trouve cela fascinant, que PETA soit allée si loin dans la voie de l’exploitation animale que les gens ont pu croire à la validité d’une telle annonce. Cela nous en dit beaucoup sur la confusion omniprésente au sein du mouvement, pour lequel les « droits des animaux » signifient « nous recueillons des animaux ; nous les tuons tous sauf 8. »

A propos, j’ai aussi posté ça sur Twitter :

HBO a débaptisé son documentaire consacré à la PETA d’Ingrid Newkirk, de « Je suis un animal » à « Je suis un animal (mais aucun de ceux que nous ‘sauvons’ et tuons). »

C’était également pour rire – bien que je suppose que ce soit, aussi, une possibilité.

Le véganisme : seulement un moyen parmi d’autres pour réduire la souffrance ou un principe fondamental pour la justice et la non-violence?

Chers collègues:

Il est primordial de comprendre qu’il existe des différences significatives parmi ceux qui se considèrent végans.

Il y a une différence entre ceux qui maintiennent que le véganisme est simplement un moyen pour réduire la souffrance et ceux qui maintiennent que c’est un engagement fondamental pour la justice, la non-violence et la reconnaissance de la personnalité morale des animaux non-humains.

La différence entre ces deux groupes n’est pas seulement un problème théorique abstrait – cela a de profondes conséquences pratiques.

La position dominante parmi les nouveaux réformateurs est que le véganisme est un moyen, parmi d’autres, pour réduire la souffrance. Veuillez bien comprendre que dans cette optique, le véganisme n’est en rien différent des élevages de poules hors-cage ou bien de la viande produite au sein d’abattoirs conçus par Temple Grandin, récompensée par la PETA. Ce sont, disent les néo-réformistes, seulement des méthodes pour réduire la souffrance. Si X choisit de réduire la souffrance en devenant végan, c’est bien; Si Y choisit de réduire la souffrance en mangeant des oeufs de poule élevées hors-cage, c’est bien. Si X décide de réduire la souffrance en mangeant végétarien le lundi et en mangeant de la viande bio le mardi, c’est bien aussi. Maintenir que X, pour des raisons morales, devrait être végan le lundi, le mardi et tous les autres jours de la semaine est « absolutiste », « fondamentaliste » ou « fanatique ».

Des gens comme Peter Singer et des groupes comme « Vegan » Outreach ou la PETA maintiennent cette position. Par exemple, Singer maintient qu’être un « omnivore consciencieux » est une « position éthique défendable ». Il prétend qu’être un vegan en toute circonstance est « fanatique ». Singer se décrit lui même comme un « végan flexible » qui est non-végan quand ça l’arrange. Il mentionne manger des oeufs et du lait bio. Il parle du « luxe » de manger de la viande et autres produits provenant d’animaux qui ont été bien traités, selon lui, et tués « humainement ». La PETA affirme qu’adhérer au véganisme par principe est seulement une question de « pureté personnelle », de « zèle culturel narcissique » et d’ »obsession fanatique ». « Vegan » Outreach insiste clairement sur la souffrance et minimise l’exploitation des animaux en prétendant que le véganisme

n’est pas une fin en soi. Ce n’est pas un dogme ou une religion ni une liste d’ingrédients interdits ou de lois immuables – c’est seulement un outil pour s’opposer à la cruauté et réduire la souffrance.

Les néo-réformistes font l’hypothèse fondamentale que tuer les animaux, en soi, ne leur inflige aucun dommage intrinsèque. Les animaux se moquent que nous les exploitions et tuons. Ils se préoccupent seulement de la façon dont nous les traitons et tuons. Dans la mesure où ils ne souffrent pas trop, les animaux sont indifférents à notre exploitation. Ils n’ont pas d’intérêt à vivre une longue vie.

C’est ce courant de pensée qui est à l’origine du mouvement « Viande Heureuse », qui constitue le plus grave retour en arrière depuis plusieurs décennies dans la lutte pour la justice envers les non-humains. C’est ce courant de pensée qui incite la PETA et Singer à maintenir que nous aurions l’obligation de ne pas être végan dans les situations où cela pourrait déranger les autres.

Je rejette ce point de vue. Je crois que c’est spéciste de maintenir que les non-humains doivent avoir un esprit similaire à l’esprit humain pour avoir un intérêt à une existence continue. Tout être conscient a un intérêt à une existence continue dans la mesure où il préfère, veut et désire rester en vie.

Nous ne pouvons pas plus justifier l’utilisation de non-humains comme ressources pour les humains que nous pouvons justifier l’esclavage. L’exploitation animale et l’esclavage ont au moins un point commun important: les deux institutions traitent des êtres conscients exclusivement comme des ressources pour les autres. Cela ne peut être justifié à l’égard des humains, cela ne peut être justifié à l’égard des non-humains non plus – quelque soit la façon dont nous les traitons.

L’approche abolitionniste voit le véganisme comme l’application du principe d’abolition à la vie de l’individu. C’est notre façon personnelle d’affirmer la personne morale de tous les êtres conscients et de rejeter le statut de simple bétail des non-humains. Le véganisme est une partie essentielle de notre engagement pour la non-violence.

Le véganisme n’est pas seulement un moyen de réduire la souffrance; c’est le strict minimum pour faire justice aux non-humains. Ce n’est pas la dernière étape dans notre quête pour rejeter la schizophrénie morale qui caractérise la relation entre humains et non-humains; C’est la première étape. Si les animaux ont une quelconque importance morale, alors on ne peut pas les manger, les exploiter, ou se vêtir de leur peau. Un végan n’est pas végan seulement le lundi ou quand ça l’arrange. Un végan est végan en permanence. Je ne choisirais pas plus de ne pas être végan pour faire plaisir à quelqu’un que je ne resterais silencieux par peur d’offenser si quelqu’un faisait une blague raciste ou harcelait une femme.

Ce n’est pas plus fanatique ou absolutiste d’être végan en toute circonstance que de rejeter la pédophilie ou le viol en toute circonstance. En effet, caractériser un véganisme permanent comme étant « absolutiste » est en soi spéciste précisément parce que nous ne décririons jamais de cette manière notre rejet total de toutes les autres formes fondamentales d’exploitation humaine.

Si vous n’êtes pas végan, devenez-le. C’est vraiment facile. C’est meilleur pour notre santé et cela réduit la violence que nous nous infligeons. C’est meilleur pour la planète et réduit le mal que nous faisons a la maison de tous les êtres vivants et aux écosystèmes qui supportent toutes les formes de vie. Mais, et c’est le plus important, c’est la chose juste à faire. Nous disons tous que nous rejetons la violence. Alors prenons au sérieux ce que nous disons. Faisons un pas important pour réduire la violence dans le monde en commentant par ce que nous mettons dans nos bouches et nos corps.

Et souvenez-vous, ce n’est pas impossible: Le monde est végane ! Si vous le voulez.

Gary L. Francione
©2010 Gary L. Francione