Brève note sur les lois « Ag Gag »

J’estime que les lois « Ag Gag » ne sont pas une bonne chose pour plusieurs raisons, à commencer par la suppression et la restriction de la liberté d’expression. Mais à en croire les grandes organisations animalistes, on pourrait penser qu’elles sonnent le glas du mouvement. C’est faux.

Nous n’avons pas besoin de nouvelles vidéos sur la réalité des élevages industriels. Nous en avons déjà plus qu’il n’en faut. Dans l’ensemble, l’objection à ces lois est liée au fait que les grands groupes animalistes ont besoin d’un flot continu d’images afin de pouvoir continuer à dire qu’il existe des élevages « responsables » et des élevages « irresponsables », des traitements « abusifs » et des traitements « non abusifs » des animaux. Ils filment des employés perpétrant des atrocités ; ils lancent alors une vaste campagne ; l’élevage fait son mea culpa et écope d’une amende symbolique ; les groupes animalistes déclarent alors « victoire » et proclament que les « abus » ont pris fin. Même dans les cas où l’élevage ou l’abattoir est lourdement sanctionné, ou fermé, la demande du public en produits d’origine animale est satisfaite via un autre élevage ou un autre abattoir. Le public, rassuré par le fait que les groupes animalistes lui assurent que désormais les animaux sont traités « humainement », maintient sa demande en produits d’origine animale.

Ainsi, c’est gagnant-gagnant pour tout le monde : les groupes animalistes récoltent à la fois lauriers et — plus important encore — dons ; le public, de son côté, est rassuré et se sent plus à l’aise par rapport au fait de consommer des produits d’origine animale.

Seuls les animaux, qui continuent d’être torturés de la plus « humaine » manière, perdent.

Nous devons amener les gens à penser différemment l’éthique animale. Nous devons les défocaliser du problème du traitement — et de l’idée qu’il existerait des traitements « abusifs » par rapport à des traitements qui seraient, eux, « non abusifs » — au profit de l’idée que nous ne pouvons justifier moralement quelque utilisation des animaux que ce soit. Point barre. Nous devons les amener à voir que la notion morale qu’ils partagent avec d’ailleurs la plupart des gens — à savoir que la souffrance et la mort ne sauraient être infligées à autrui qu’en cas de « nécessité » vitale et absolue, et que le plaisir, le divertissement ou le confort, autrement dit tout ce pour quoi et au nom de quoi nous faisons souffrir et tuons les animaux, ne constituent en aucun cas des « nécessités » —, mène à la conclusion que nous ne pouvons justifier l’exploitation animale, et que notre reconnaissance du fait que les animaux possèdent un statut moral signifie que nous ne pouvons pas consommer de la viande, des produits laitiers ou des œufs, même s’ils arborent un label exploitation « heureuse » plébiscité ou approuvé par une ou plusieurs grandes associations animalistes.

J’ai l’intention d’écrire plus longuement sur ce sujet dans le futur.

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Si vous n’êtes pas végan, s’il vous plaît, devenez-le. Le véganisme est une question de non-violence. C’est d’abord une question de non-violence envers les autres êtres sentients. Mais c’est aussi une question de non-violence envers la terre et envers vous-même.

Le monde est végane ! Si vous le voulez.

Gary L. Francione
Professeur, Rutgers University
©2013 Gary L. Francione