Chers Collègues :
Dans le Mail Online d’aujourd’hui, l’édition en ligne du journal britannique Daily Mail, figure un article fascinant sur la vivisection signé du Dr. Danny Penman, ancien chercheur en biochimie reconverti dans le journalisme scientifique pour New Scientist et le Daily Mail.
Penman reconnaît clairement soutenir la vivisection :
Comme la plupart des gens, je sacrifierais la vie d’innombrables animaux de laboratoire pour sauver ma fiancée ou d’autres membres de ma famille.
Ignorant le fait que la plupart des gens, dans une situation où ils seraient forcés de choisir, sacrifieraient de la même façon la vie d’innombrables humains pour sauver leurs proches (et l’on voit bien ici que le problème n’a donc rien à voir avec la question des animaux), Penman poursuit en exprimant son inquiétude quant à l’augmentation, au cours de l’année dernière, du nombre d’animaux utilisés dans les laboratoires de recherche britanniques (+ un demi-million), lequel s’élève désormais à 3,7 millions.
Penman maintient que l’utilisation d’animaux est nécessaire, mais soutient que la vivisection représente une réelle menace pour la santé humaine. Il cite New Scientist, qui rapporte que les résultats obtenus par le biais de la vivisection ne sont « pas plus probants qu’un jeu de pile ou face », et bien que lui, Penman, n’aille pas aussi loin, il est néanmoins d’accord pour dire que la « vivisection est, au mieux, peu fiable, au pire, meurtrière. » Il cite plusieurs exemples où des médicaments ayant été testés sur des animaux sans qu’il y ait eu, chez ceux-ci, de réaction contraire, ont rendu des humains gravement malades ou ont provoqué leur mort. Il plaide en faveur des nouvelles technologies n’impliquant pas d’animaux, et qui sont, de fait, beaucoup plus fiables.
Etant donné que Penman soutient la vivisection, la critique qu’il en fait est tout à fait remarquable. Je suis d’ailleurs incapable de me rappeler la dernière fois où il m’a été donné de lire pareil discours.
Peut-être cette autre remarque de Penman explique-t-elle le manque de critiques formulées à l’encontre de la vivisection :
Pourquoi y a-t-il tant d’expérimentations animales alors que des alternatives existent ?
Ironiquement, l’une des raisons en est que la violence et l’intimidation dont fait montre une poignée de fanatiques impliqués dans les droits des animaux a eu pour résultat d’obscurcir le débat. Parce que si, aujourd’hui, vous remettez en cause le travail des scientifiques, vous risquez d’être mis dans le même sac que les extrémistes.
Les scientifiques ont ainsi été en mesure de développer leurs recherches sur les animaux sans qu’aucune autorité ait pris la peine de vérifier si ces tests étaient vraiment nécessaires. Ceci me semble à la fois injuste et contre l’esprit de la recherche universitaire.
Penman a absolument raison. Par suite de l’existence d’un groupe relativement restreint d’individus prônant l’usage de la violence contre les vivisecteurs, remettre en question ou débattre désormais de la vivisection, fût-ce dans un contexte universitaire, expose à voir ses opinions rejetées en tant qu’appartenant à un ordre du jour extrémiste ou violent.
Cette remarque ne s’applique pas seulement à la vivisection, mais aux questions concernant les animaux en général. Les actes d’un petit nombre de personnes ont permis à une presse réactionnaire, de mèche avec les exploiteurs institutionnels qui préfèrent ne pas avoir à discuter de ce genre de choses, de créer l’impression que ceux qui s’opposent généralement à l’exploitation animale sont de violents misanthropes qui attachent de la valeur à la vie des animaux mais qui se moquent de la vie humaine.
Nous ne devons pas laisser prévaloir une telle caractérisation.
Comme vous le savez, je m’oppose, pour des raisons morales, à la violence sous toutes ses formes (voir, par exemple, Un commentaire sur la violence et Plus sur la violence et les droits des animaux). J’approuve le concept de l’Ahimsa.
La violence à l’encontre des exploiteurs institutionnels n’est pas seulement immorale, elle est encore incohérente – elle n’a aucun sens. Les exploiteurs institutionnels ne sont pas « l’ennemi ». Nous sommes ceux qui demandons des produits d’origine animale. Si nous arrêtions d’en consommer, les exploiteurs institutionnels déplaceraient leur capital ailleurs. Nous sommes ceux qui croyons toujours au mythe qui veut que la vivisection nous permette de vivre des existences meilleures et plus longues et, par conséquent, nous continuons de la soutenir, ne serait-ce qu’en n’exigeant pas de nos hommes politiques qu’ils s’assurent que les alternatives mentionnées par Penman sont utilisées et que d’autres sont en développement.
La plupart des « animalistes » ne sont même pas végans. Ils tolèrent et soutiennent la torture des animaux nonhumains simplement parce qu’ils aiment le goût des produits d’origine animale et qu’ils sont tout simplement incapables de se passer de fromage, de glaces ou de quelque autre aliment animal qu’ils ont coutume de consommer. En quoi ces personnes diffèrent-elles moralement des vivisecteurs ? Au moins certains vivisecteurs pensent qu’ils œuvrent pour le bien de la société. Comme je l’ai indiqué dans mes écrits, je ne suis pas d’accord avec l’idée selon laquelle l’utilisation des animaux est nécessaire en tant que fait empirique et, comme Penman et d’autres, je maintiens que la vivisection est souvent clairement contreproductive. A vrai dire, et contrairement à Penman, je suis d’accord avec la déclaration qu’il attribue au New Scientist: les résultats obtenus par le biais de la vivisection ne sont « pas plus probants qu’un jeu de pile ou face ». Même si ce n’était pas le cas, même si la vivisection se révélait utile de quelque manière, elle ne s’en trouverait pas pour autant moralement justifiée. Mais les non-vegans soutiennent l’exploitation simplement en vertu d’un caprice de goût. Ils n’ont aucune excuse.
Je ne souhaiterais certainement pas que quiconque préconise la violence à l’encontre des non-végans, d’autant qu’ils forment le gros de ce qu’on a coutume d’appeler le « mouvement animaliste » ! Cela étant, et hormis si vous partagez mon rejet général de la violence, désigner à la vindicte les exploiteurs institutionnels, qu’ils soient agriculteurs ou vivisecteurs, n’a simplement pas le moindre sens.
J’invite tous les défenseurs des animaux à rejeter la violence sans équivoque ni réserve aucune. Le mouvement des droits des animaux fait sens seulement en tant que mouvement pacifiste et non-violent. Gandhi a dit :
Soyons le changement que nous voulons voir dans le monde.
Si nous souhaitons qu’advienne un monde débarrassé de la violence envers les plus vulnérables, nous devons devenir nous-mêmes non-violents et présenter nos opinions de manière non-violente. La non-violence commence avec notre propre véganisme et notre recours à des moyens créatifs et pacifiques pour sensibiliser les autres au véganisme.
Gary L. Francione
© 2009 Gary L. Francione