A propos des « parcours »

Si quelqu’un disait : « Je n’ai pas cessé d’être raciste du jour au lendemain ; cela m’a pris du temps », dirions-nous que le rejet du racisme est une question de parcours « personnel » ? Dirions-nous que nous ne devons pas affirmer que le racisme est, sans la moindre équivoque possible, une mauvaise chose ? Dirions-nous que le fait de continuer d’être racistes — mais des racistes plus « empathiques » — est moralement acceptable ?

Bien sûr que non. Prétendre qu’il ne s’agirait là que d’une question de « parcours » personnel reviendrait à dire qu’il n’y a pas de vérité morale sur le racisme.

C’est exactement la même chose en ce qui concerne les animaux. Prétendre que le véganisme n’est qu’une question de « parcours » personnel revient à dire qu’il n’y a pas de vérité morale sur le spécisme.

Cela revient à nier l’idée que nous ne pouvons justifier l’exploitation animale — fût-elle prétendument « humaine ».

Cela revient à dire que les diverses formes de l’exploitation prétendument « heureuse » sont moralement acceptables et dignes d’être encouragées.

Nous n’adoptons pas un tel discours lorsque des humains sont concernés. Nous ne devons pas le faire non plus avec les droits des animaux.

La plupart des gens ne deviennent pas végans du jour au lendemain. Ce n’est pas une grosse surprise, particulièrement en raison du fait qu’aucune des grosses associations animalistes ne présente le véganisme comme principe moral de base ; et la plupart soutiennent explicitement diverses sortes d’exploitation « heureuse ».

Mais la question ne réside assurément pas dans la manière dont une personne ou la plupart des gens deviennent végans. La question, c’est quelle position doit adopter un mouvement social pour les droits des animaux. Ensuite, comme l’abolitionniste de l’esclavage William Wilberforce (1759-1833) l’a dit : « Vous pouvez choisir de détourner le regard mais vous ne pourrez plus jamais dire que vous ne saviez pas. »

La seule posture morale des droits des animaux doit être la suivante : nous ne pouvons justifier l’exploitation animale et, si nous sommes d’accord pour dire que les animaux ont une importance morale, alors nous épousons nécessairement un mode de vie végan. Il y a le véganisme d’une part, et d’autre part il y a le fait de continuer à participer à une exploitation qui ne peut être justifiée. Il n’y a pas de troisième choix.

La question n’est pas de condamner ou de critiquer qui que ce soit. La question, c’est d’être clair quant aux principes moraux ; c’est d’éduquer au véganisme, d’une manière franche, cohérente et non-violente, celles et ceux qui se soucient des animaux sans être végans.

Si, malgré tout, ces personnes choisissent de ne pas être véganes (ce qui pourtant est la moindre des choses due aux animaux), cela devrait rester leur choix, et non ce qu’un mouvement pour la justice nonhumaine doit promouvoir.

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Si vous n’êtes pas végan, devenez-le s’il vous plaît. Le véganisme est une question de non-violence. C’est d’abord une question de non-violence envers les autres êtres sentients. Mais c’est aussi une question de non-violence envers la terre et envers vous-même.

Le monde est végane ! Si vous le voulez.

Gary L. Francione
Professeur, Rutgers University
©2014 Gary L. Francione